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L’usage récréatif sera légalisé, mais n’oublions pas le potentiel nocif du cannabis
juin 07, 2016, Par: Peter Kemp, inf. aut., B. Sc.inf., CPMHN(C))
Infirmier spécialisé en interventions d’urgence dans un grand hôpital communautaire, je m’occupe souvent de personnes et de familles touchées par une consommation problématique de substances. L’alcool est celle que je rencontre le plus souvent. Oui, l’alcool : légal, réglementé et hautement profitable. Avec l’annonce que le gouvernement fédéral présentera une loi au printemps prochain pour légaliser et réglementer le cannabis à des fins récréatives, je crains que la marijuana ne vienne concurrencer l’alcool.
Le Canada compte parmi les nombreux pays qui cherchent de meilleures stratégies de santé publique et tendent à décriminaliser la consommation de cannabis. Si j’appuie la légalisation du cannabis comme stratégie de santé publique, je crains que les revenus potentiels, tant fiscaux que commerciaux – estimés à plusieurs milliards de dollars par an – ne tirent la politique dans le sens des profits, au détriment de la santé. Le gouvernement affirme vouloir empêcher que le cannabis ne se retrouve entre les mains des enfants et les profits entre celles des criminels, mais il n’explique pas comment la légalisation réduira le nombre d’utilisateurs et les effets néfastes pour la société. Il doit envoyer le message clair que légaliser le cannabis ne revient pas à en approuver la consommation.
Le Cadre stratégique pour le contrôle du cannabis du Centre pour la toxicomanie et la santé mentale, axé sur la santé publique, contient d’excellentes recommandations pour un système légalisé, y compris la mise en place d’un âge minimum pour l’achat et la consommation et l’interdiction de la publicité, du marketing et des parrainages (ce que nous ne sommes malheureusement pas arrivés à faire pour l’alcool). Cependant, certaines des autres recommandations pourraient je crois aggraver certain des problèmes sociaux que la législation est sensée résoudre. Il serait inutilement onéreux de mettre en place un monopole gouvernemental sur les ventes, une politique des prix conçue pour limiter la demande, des tests obligatoires pour vérifier la puissance des produits et des règles pour l’étiquetage. De plus, de telles mesures dissuaderaient les fournisseurs illégaux de se joindre au marché légal.
La légalisation ne devrait pas être vue comme un abandon de la guerre contre la drogue; elle signifierait seulement que les armes utilisées dans cette guerre évoluent. Une stratégie axée sur la réduction des méfaits est un outil efficace, mais une action contre les problèmes de société et de santé mentale susceptible d’encourager la consommation de cannabis l’est tout autant.
Les professionnels des soins de santé doivent être davantage prêts à étudier les avantages potentiels du cannabis pour le traitement de problèmes de santé. J’ai entendu beaucoup de récits anecdotiques de patients pour qui elle soulage la douleur et la détresse associées à divers problèmes de santé et maladies, mais des recherches complémentaires sont nécessaires dans ce domaine. Une fois le cannabis légalisé, plus de gens pourraient y recourir aux fins d’automédication. Nous devrons être prêts à discuter ouvertement avec les patients, sans juger, à les éduquer quant aux façons de prendre cette drogue en toute sécurité ou à les aider à trouver d’autres traitements ou stratégies. Pour mener ces conversations et sensibiliser le public, il nous faudra être formés nous-mêmes.
Le gouvernement a promis de consulter les parties concernées et les experts pendant qu’il prépare le projet de loi. Ce sera à ce stade, pendant que l’on règle les points de détail, que nous pourrons le mieux faire pression sur le gouvernement pour qu’il se soucie avant tout de la santé et du bien-être de la population. L’inclusion manifestée pendant ce processus, et sa réussite, pourraient déterminer si la législation entraînera une réduction des méfaits pour la santé et la société ou une augmentation des problèmes déjà graves de santé mentale, de société et de toxicomanie.
Peter Kemp, inf. aut., B. Sc.inf., CPMHN(C), a travaillé en soins actifs aux patients hospitalisés, comme infirmier légiste et en soins d’urgence en santé mentale depuis l’obtention de son diplôme du programme de sciences infirmières de l’Université de Windsor/St. Clair College en 2011.
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