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S’attaquer à un tabou : le sexe en établissement de soins actifs

  
https://www.canadian-nurse.com/blogs/cn-content/2019/05/30/tackling-the-taboo-sex-in-acute-care-settings
mai 30, 2019, Par: Rachel Ollivier
Blue curtains in a white room.
iStock.com/Pixelci

Dans mon travail d’infirmière en médecine et chirurgie, j’ai rencontré des situations gênantes concernant les besoins d’activité ou de plaisir sexuels de mes patients lorsque je m’occupais de leur santé générale. Le plus souvent, la question s’est présentée quand un ou une collègue de l’unité ou moi-même avons été témoins de l’activité sexuelle de patients qui se croyaient dans un lieu privé. Ces situations ont été source de tension pour moi, car je n’étais pas censée voir ce que j’ai vu et parce que j’avais le sentiment d’avoir fait irruption dans la vie privée de ces gens.

Enseignements tirés

  • Les besoins et la santé sexuels ne reçoivent pas assez d’attention dans les établissements de soins actifs malgré leur importance pour les patients.
  • Le personnel infirmier joue un rôle clé et il est bien placé pour lancer la discussion sur la santé sexuelle, voire sur l’activité sexuelle ou les autres besoins sexuels, avec les patients qui séjournent à l’hôpital.
  • Les établissements de soins de santé doivent donner au personnel des directives, une formation et un soutien pour les aider à promouvoir la santé sexuelle des patients d’une façon sûre, individualisée et adaptée.

Infirmière, je comprends l’importance de la santé et du bien-être holistiques, y compris la santé sexuelle. Mais l’absence de politiques en matière d’activités sexuelles dans l’unité ou l’établissement, entre autres, rend la question difficile à gérer. Les activités sexuelles, comme la masturbation ou les rapports sexuels, sont-elles « autorisées » ou pas? Comment réagir à leur égard?

La situation est aussi difficile pour les patients, car ils sont soumis à l’horaire et aux rythmes de l’unité, avec très peu de temps ou d’occasions pour profiter d’une certaine intimité. Se retrouvant dans un contexte nouveau et parfois déconcertant, ils peuvent avoir le sentiment qu’il ne reste plus de place pour la vie ordinaire comme ils la connaissaient chez eux, même lors d’un séjour prolongé (pendant qu’ils attendent leur transfert vers un établissement communautaire, par exemple). Les patients doivent donc se débrouiller seuls pour trouver des façons de satisfaire leurs besoins sexuels. La sexualité étant tabou dans notre société, les discussions sur le sujet sont difficiles entre les patients et le personnel infirmier. Je pense malgré tout que c’est à nous, en tant que fournisseurs de soins de santé, d’engager la conversation afin de contribuer à la santé holistique, y compris la santé sexuelle, dans le contexte d’une hospitalisation. La discussion peut avoir lieu avec nos patients et leur famille, avec nos collègues ou avec nos superviseurs.

Compte tenu du tabou actuel, personnel infirmier et patients ne peuvent discuter des activités et besoins sexuels que de certaines façons, comme dans un contexte éducatif où une infirmière ou un infirmier fournit de l’information sur les pratiques sexuelles sans risque, sur la négociation de relations sexuelles ou sur le dépistage des ITS. Il leur est cependant plus difficile de parler de façon personnelle de la « vie sexuelle » d’un patient, qu’il s’agisse de masturbation ou de rapports sexuels, sans formation ou soutien dans leur milieu de travail. À ce sujet, il est important de souligner que le personnel de première ligne n’étant pas le seul concerné, les établissements de soins de santé doivent inclure la santé sexuelle à leurs politiques de soins et à la formation de leur personnel.

Il existe diverses façons dont nous pouvons aider les patients à s’occuper de leur santé sexuelle sans risque et sans problème, par exemple engager la conversation en mentionnant que les besoins sexuels sont une préoccupation courante pour les patients. Il s’agit ensuite de réserver quelques moments en tête à tête avec le patient ou la patiente pour voir si la personne souhaite avoir de l’intimité et sous quelle forme. L’activité sexuelle n’est pas la seule façon de veiller à la santé sexuelle d’une personne. Les patients ne planifient généralement pas de séjourner à l’hôpital assez longtemps pour que leurs besoins sexuels deviennent un souci immédiat (ils peuvent aussi se sentir trop malades pour envisager la moindre activité sexuelle). Il est donc important que le personnel infirmier, en plus d’évaluer la nécessité d’une conversation et d’un soutien, milite aussi pour que la question soit abordée dans les politiques de santé, les lignes directrices et les protocoles de l’unité.

Que les patients conçoivent leurs besoins sexuels comme un aspect important de leurs soins ou non, en évitant la question, on ne la résout pas : on la rend invisible. La situation privilégiée du personnel infirmier en tant que partenaire de la santé aux premières lignes des soins, de l’administration et de la recherche, lui offre la possibilité de lutter contre le tabou et de promouvoir la santé sexuelle, non comme un désagrément, mais comme un complément aux soins et au traitement.

En tant que professionnels des soins de santé, les infirmières et infirmiers observent les problèmes qui se posent quand on fournit des soins et ils peuvent avoir une influence, dans tous les domaines et à tous les niveaux. Nous devons donc promouvoir une inclusion progressive de la santé et des besoins sexuels des patients dans ce domaine parce que nous savons que cette question touche la qualité de vie et qu’elle n’a pas reçu l’attention qu’elle mérite. En l’ignorant, nous ne compromettons pas seulement l’expérience des patients à l’hôpital, mais aussi leur santé dans son ensemble.

Ressources additionnelles

Ollivier, R., Aston, M. et S. Price. Let’s talk about sex: A feminist post-structural approach to addressing sexual health in the health care setting. Journal of Clinical Nursing, 28(3-4), p. 695-702. http://dx.doi.org/10.1111/jocn.14685


Rachel Olliver est infirmière autorisée à l’unité de chirurgie pour adultes (Santé des femmes) au IWK Health Centre d’Halifax (N.-É.). Elle est aussi doctorante à l’École de sciences infirmières de l’Université Dalhousie, et ses recherches doctorales porteront sur la santé sexuelle postnatale.

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