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Une maladie grave donne à cette infirmière « un nouvel angle sous lequel percevoir le monde »

Par April Fox
15 avril 2024

Mon choix de carrière en soins infirmiers était interrelié à un désir d’aider les gens à traverser la maladie et de contribuer à ma communauté avec passion et tout en cherchant à atteindre un but. Pendant 15 ans, je me suis épanouie dans un environnement périopératoire, maîtrisant les compétences techniques et approfondissant mes connaissances des techniques chirurgicales, terminant chaque journée avec la satisfaction d’avoir contribué aux soins et à la guérison des patients sur le plan individuel.

Ma vie s’est ensuite transformée en quelque chose de méconnaissable, et ma vie professionnelle a pris un tournant inattendu à la suite du développement d’une maladie neuromusculaire auto-immune rare appelée myasthénie grave, ou faiblesse musculaire grave. En proie à de vagues symptômes fluctuants difficiles à décrire, j’ai entamé un parcours de patiente qui s’est révélé à la fois difficile et valorisant.

Voici les leçons que j’ai apprises en tant que patiente et qui guideront ma pratique continue en tant qu’infirmière.

La défense des intérêts des patients est aussi importante que les soins physiques prodigués par les infirmières et infirmiers

La profession infirmière exige un rythme rapide, de la diligence et donne souvent l’impression que les tâches nécessaires dépassent le temps dont on dispose pour les mener à bien. Les soins infirmiers sont prioritaires, et nous nous acquittons de nos tâches au mieux de nos capacités, compte tenu des circonstances. Cependant, il semble que la défense des intérêts des patients soit un rôle infirmier qui peut être mis de côté en cas de forte pression et de manque de temps ou de ressources. L’importance de la défense des intérêts a été accentuée pour moi lorsque j’ai appris à naviguer dans le système de santé en tant que patiente.

Qu’il s’agisse de s’assurer que j’ai été correctement orientée et que j’ai reçu le bon diagnostic, ou d’insister pour obtenir les traitements les plus efficaces, j’ai dû défendre mes intérêts à de nombreuses reprises et dans des circonstances diverses. Je me suis plongée dans la recherche, j’ai recherché le savoir expérientiel d’autres personnes vivant avec la myasthénie grave et j’ai fait en sorte de jouer un rôle important au sein de mon équipe soignante. J’y suis arrivée en utilisant mes compétences en matière de défense des intérêts et mes connaissances du système de santé, mais je me demande comment d’autres personnes qui n’ont pas ces compétences et ces connaissances peuvent comprendre leur plan de soins et y prendre part, sans compter d’intervenir et de s’exprimer à voix haute. La défense des intérêts des patients est un rôle infirmier que je sous-estimais auparavant, mais qui a été mis au premier plan à la suite de mon expérience.

La défense des intérêts des patients peut être une compétence difficile à maîtriser, qui nécessite un état d’esprit ouvert, la conviction que les capacités ne sont pas figées et peuvent être développées grâce à des efforts ciblés. Voici quelques conseils pour mieux défendre les intérêts de vos patients :

• Bien que les infirmières et infirmiers ne puissent pas connaître tous les problèmes de santé, en particulier les maladies rares, la défense des intérêts des patients se résume à s’exprimer pour eux, en particulier dans les situations où ils peuvent se sentir impuissants.
• Les infirmières et infirmiers en début de carrière peuvent intégrer la défense des intérêts dans leurs soins en s’exprimant au nom des patients, en les informant sur leur état de santé et sur les traitements connexes et en assurant la liaison entre eux et les autres professionnels de la santé.
• Au fur et à mesure que les infirmières et infirmiers évoluent dans leur carrière et acquièrent des compétences en matière de défense des intérêts, ils peuvent prendre part à l’apprentissage continu pour aider les patients dont l’état de santé n’est pas courant à comprendre où et comment un porte-parole actif peut être bénéfique.
• Grâce à l’expérience et à l’autoformation, l’ensemble des infirmières et infirmiers peuvent mettre les patients en lien avec les ressources et des systèmes de soutien et, peut-être, avec la plus grande des ressources : l’autonomisation lorsque les patients commencent à défendre leurs propres intérêts.

Les patients en savent long sur leur maladie et les professionnels de la santé peuvent apprendre d’eux

Un rôle important de l’infirmière ou de l’infirmier est l’éducation en matière de santé, afin d’optimiser les connaissances des patients sur leur état de santé. Parce que les connaissances sont synonymes de pouvoir, l’information permet aux patients d’assumer un rôle actif dans leur santé.

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D’après mon expérience en tant que patiente, je crois maintenant fermement qu’en plus d’assumer un rôle d’éducation en matière de santé, les infirmières et infirmiers devraient aussi passer en mode d’apprentissage permanent. Bien que les membres du personnel infirmier possèdent de vastes connaissances sur divers problèmes de santé, nous pouvons toujours en apprendre plus, surtout auprès de nos patients. Les personnes atteintes d’une maladie rare ou chronique comprennent les défis quotidiens et les facteurs limitatifs découlant des symptômes que les professionnels de la santé ne peuvent pas contextualiser de la même façon sans avoir vécu l’expérience.

Depuis mon diagnostic, j’ai rencontré de nombreux professionnels de la santé, tous avec des diplômes et une formation, des connaissances et une expérience, des attitudes et des perceptions différentes. J’ai été intégrée et valorisée en tant que composante nécessaire de mon équipe soignante et de mon plan de traitement, mais j’ai aussi éprouvé des sentiments d’incrédulité et de rejet de la part de ceux et celles auprès de qui j’ai cherché de l’aide. Dans la période précédant mon diagnostic, je cherchais activement des réponses à mes symptômes, mais je me heurtais parfois au scepticisme et à l’incrédulité, ce qui m’a amenée à douter de ce que je ressentais et de ce que je vivais. Un manque croissant de confiance en moi et en mes hypothèses m’a amené à réfléchir à ma propre pratique.

J’ai eu la chance d’être en lien avec des fournisseurs de soins de santé exceptionnels qui ont travaillé sans relâche pour m’orienter correctement, obtenir un diagnostic et le traitement correspondant. À l’avenir, je n’oublierai jamais ce que j’ai éprouvé en tant que patiente, aux deux extrémités du spectre, et j’intégrerai ces leçons dans ma pratique infirmière. Dans une relation mutuelle, les membres du personnel infirmier et les patients peuvent apprendre les uns des autres et s’enrichir mutuellement.

La réflexion sur l’aptitude d’esprit critique peut améliorer les soins de santé

L’esprit critique est indispensable à la pratique infirmière. Bien que l’esprit critique puisse être défini de différentes façons, il s’agit fondamentalement de la capacité à analyser des données et des observations, à remettre en question des hypothèses et des opinions auparavant émises, à raisonner et à réfléchir, et à porter un jugement clinique sur la base de toutes les variables disponibles. Je mets les infirmières et infirmiers au défi non seulement de réfléchir à leur capacité à penser de façon critique, mais aussi d’évaluer de façon plus poussée la plausibilité de trouver leur voix au sein d’une équipe multidisciplinaire et hiérarchique lorsque leur jugement en indique la nécessité.

L’importance conséquentielle de l’esprit critique a été personnellement soulignée au moment le plus bas de mon expérience de la maladie, une crise causée par l’affaiblissement des muscles respiratoires. Au service des urgences, j’ai expliqué à de nombreux membres du personnel soignant que ma faiblesse respiratoire n’était pas représentée par la mesure de la saturation en oxygène; elle était attribuable à une faiblesse musculaire et n’était pas un problème d’échange d’oxygène. Pourtant, dans ce cas, je me suis sentie ignorée et éloignée du rôle de participante active à mes soins. J’ai eu l’impression qu’en se concentrant sur le seul paramètre de l’oxygénation sanguine, l’équipe soignante négligeait la physiopathologie qui aurait donné lieu au traitement approprié. Dans ce scénario, l’esprit critique aurait amené l’équipe soignante à aller au-delà d’un seul paramètre diagnostique, à mettre en cause la patiente, à envisager tous les facteurs d’influence et à prendre la décision la plus appropriée, fondée sur des données probantes, en matière de soins.

Conclusion

Bien que mon expérience de la maladie ait engendré des circonstances négatives et difficiles dans ma vie, je l’ai également perçue comme une source d’enseignement. Elle m’a permis de m’améliorer en tant que personne, parent, amie et surtout comme infirmière. Nous ne pouvons pas contrôler la plupart des incidents qui nous arrivent, mais nous pouvons contrôler la façon dont nous y réagissons. Bien que la myasthénie grave soit incurable et que la fréquence et la gravité des symptômes soient très variables, il est possible de la prendre en charge avec les bons traitements. Je ne suis pas exempte de symptômes, mais j’ai appris à structurer mes journées en fonction de mes limites et j’envisage l’avenir avec optimisme. J’ai tiré des leçons de mon expérience de patiente et je poursuivrai ma carrière d’infirmière en mettant en application les connaissances acquises et en voyant les choses sous une autre perspective.

J’ai un nouveau regard sur le monde, en particulier sur les soins aux patients et le système de santé. Les soins infirmiers englobent la formation continue et le perfectionnement professionnel. La façon dont nous acquérons des connaissances et formons notre propre interprétation peut être aussi variée et complexe que la nature des êtres humains. Au fil de l’évolution de la profession, chaque infirmière et infirmier doit aborder sa pratique avec un esprit ouvert et une volonté d’apprendre et de progresser auprès de ses patients.

Je suis fière d’être infirmière et de profiter des leçons que j’ai apprises de l’autre côté de la relation des soins de santé.

April Fox, inf. aut., travaille comme infirmière clinicienne enseignante au Red Deer Regional Hospital Centre, en Alberta.

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