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Les gestes que vous pouvez poser pour soutenir et reconnaître les patients et les collègues qui s’identifient comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+
Par Adam Brandt
3 février 2025
Messages à retenir :
- Le terme « personne alliée » est souvent utilisé comme un nom, mais c’est aussi un verbe qui décrit une action. Si vous voulez être une alliée ou un allié des personnes s’identifiant comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+ ou des personnes ou des communautés méritant l’équité, votre alliance inclusive doit comprendre des actions cohérentes. Quelle action pouvez-vous prendre dans votre travail en pratique infirmière pour soutenir et reconnaître la patientèle et les collègues qui s’identifient comment faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+?
- Les choses simples ne sont pas si simples. Le langage est le pouvoir. La neutralisation du langage et les questions ouvertes peuvent transmettre la possibilité d’évoluer et le désir de comprendre.
- Penchez-vous sur votre inconfort et informez-vous. La terminologie change fréquemment à mesure que la conscience publique sur la réduction des méfaits évolue.
Nous sommes en plein hiver, mais je suis réconforté à l’idée que le Mois de la fierté a lieu en juin. Chaque année, pendant le Mois de la fierté, je ressens une joie queer et une légèreté alors que je suis entouré de la communauté que j’ai choisie.
Mais je me sens aussi épuisé. Je vois sur les médias sociaux les commentaires de gens qui ne savent pas pourquoi la Fierté est nécessaire, ce qui prouve qu’elle l’est. Je constate une augmentation de la rhétorique et du discours haineux contre les droits des personnes qui s’identifient comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+ et, en particulier, des personnes qui s’identifient comme étant de genre expansif ou transgenre. Les soins infirmiers sont intrinsèquement politiques, tout comme la fierté.
C’est pourquoi j’ai acheté en ligne une épinglette de la Fierté pour l’ajouter à mon insigne de travail, dans l’espoir de créer des espaces plus sûrs pour ma patientèle qui s’identifie comme appartenant à la communauté 2SLGBTQIA+. J’ai mis une épinglette aux couleurs de l’arc-en-ciel sur mon insigne d’identification du travail, mais lorsque je me suis garé dans le stationnement de l’établissement, j’ai décidé que ce n’était pas le jour et j’ai enlevé l’épinglette. Ce n’est pas que je n’étais pas fier ou que je n’étais pas à l’aise avec mon identité. Je ne me sentais tout simplement pas à l’aise à l’idée de me dévoiler subtilement à tout le monde, et je craignais que le fait d’être authentique ne m’expose à la discrimination.
Nous sommes en 2025 et nous devrions avoir dépassé ce stade. Cependant, la réalité est que le fait de révéler mon identité à la patientèle et aux collègues m’expose à la discrimination. Il était plus facile d’enlever mon épinglette aux couleurs de l’arc-en-ciel que de communiquer subtilement à mes collègues et ma patientèle que je suis de genre queer.
Je reconnais l’ironie de la situation, car les membres du personnel infirmier ont de façon inhérente un rôle de pouvoir sur la patientèle, mais à ce moment-là, je me suis senti dépossédé de mon pouvoir. Inversement, je crains que ma patientèle qui n’a pas de pouvoir, en particulier les personnes qui s’identifient comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+, ne se sentent pas vraiment à l’aise de révéler leur nature authentique à leurs infirmières ou infirmiers parce que notre profession ne leur renvoie pas le reflet de qui elles sont vraiment.
Grandir dans le sud-est du Manitoba
J’ai grandi dans le sud-est du Manitoba, qui est considéré comme la « ceinture biblique » de la province. Je ne voyais pas de gens comme moi dans la petite communauté agricole où j’ai grandi. Il n’y avait pas de représentation des personnes qui n’étaient pas hétérosexuelles (une personne attirée sexuellement ou romantiquement par des personnes du genre ou du sexe opposé) ou cisgenres (une personne dont l’identité de genre est conforme au sexe qui lui a été assigné à la naissance). Ce manque de représentation a renforcé la cishétéronormativité (l’hypothèse selon laquelle tout le monde est cisgenre et hétérosexuel) au sein de la communauté et en ce qui me concerne.
Accepter mon orientation sexuelle a été une période très difficile de ma vie. Avant de prendre conscience que j’étais de genre queer, j’aimais l’école et j’étais très motivé sur le plan scolaire; après, cependant, je me suis détaché du monde scolaire. C’est probablement l’une des raisons pour lesquelles les soins infirmiers n’ont jamais fait partie de mon orientation professionnelle (et encore moins les études supérieures). Je ne me sentais pas en sécurité de dévoiler ma vraie nature dans ma communauté, et c’est pourquoi j’ai choisi de la quitter lorsque j’ai obtenu mon diplôme d’études secondaires. En y repensant aujourd’hui, je ne m’y sens toujours pas en sécurité ni à l’aise.
À ce jour encore, je suis aux prises avec l’homophobie intériorisée (l’acceptation d’attitudes externes négatives à l’égard de l’homosexualité qui crée une image négative de soi) et j’apprends comment elle se manifeste dans ma vie de manière insidieuse. Par exemple, je n’avais pas compris que ma gêne fréquente à parler de mon orientation sexuelle avec les autres et la peur de rendre les autres mal à l’aise en dévoilant mon identité étaient une manifestation d’hétéronormativité et d’homophobie intériorisées. C’est quelque chose que je vais devoir désapprendre pour le reste de ma vie.
De la faculté des sciences infirmières de premier cycle à la pratique clinique
Les personnes s’identifiant comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+ n’étaient pas représentées dans mon programme d’études de premier cycle, ni dans le corps enseignant ni dans la population étudiante. Ce manque d’inclusion et de représentation m’a appris que la profession infirmière n’avait pas de place pour moi non plus. J’ai été témoin et victime d’une discrimination cachée fondée sur l’orientation sexuelle et l’identité de genre.
Ce n’est qu’au cours de la dernière année de mon programme universitaire de premier cycle que je me suis senti à l’aise d’indiquer indirectement, dans un article d’autoréflexion, ma sexualité à mes enseignantes ou enseignants. Je n’en avais pas informé mes pairs et ce n’était que la deuxième fois où je révélais mon identité, mon être entier, à une enseignante. Lorsque mon enseignante m’a retourné mon travail avec ses commentaires, j’étais anxieux. Sa réaction à mon autoréflexion a été positive et m’a encouragé à poursuivre des études supérieures. Pendant mes études de premier cycle, j’essayais de survivre, sans qu’on m’étiquette, et je ne savais pas si la profession infirmière me conviendrait.
Après mes études, j’ai travaillé comme infirmier de chevet et mes collègues ont soutenu mon identité. Le fait que plusieurs étaient aussi de genre queer m’a aidé, ce qui était en soi une source d’affirmation. Tout au long de ma carrière d’infirmier, j’ai pu constater de première main la nature insidieuse de la cisnormativité et de l’hétéronormativité au sein du système de santé. Le fait d’être confronté à cette situation m’a démuni et m’a amené à me demander comment je pouvais travailler au sein d’un système qui a fait du tort à de nombreuses personnes. Cela m’a amené à me demander si d’autres infirmières ou infirmiers s’identifiant comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+ avaient vécu des expériences semblables.
Bien que la profession infirmière soit ancrée dans la justice sociale et la défense des droits, j’ai été déconcerté de ne trouver que peu de littérature grise et évaluée par mes pairs sur les expériences de ma communauté dans tous les aspects du monde universitaire et de la pratique.
Études supérieures
En repensant aux commentaires que m’a faits mon enseignante en sciences infirmières, il n’est pas étonnant que j’aie posé ma candidature aux études supérieures. Mon expérience en tant que personne de genre queer dans la pratique infirmière m’a incité à étudier la santé et le mieux-être des personnes qui s’identifient comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+. Le manque de littérature sur le personnel infirmier qui s’identifie comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+, les collègues infirmiers qui s’identifient comme étant 2SLGBTQIA+ avec lesquels j’ai eu le privilège de travailler et la riche histoire que j’ai découverte de nombreux membres du personnel infirmier s’identifiant comme étant de la communauté 2SLGBTQIA+ au sein de la profession m’ont incité à poursuivre mes recherches de thèse explorant les expériences vécues par les infirmières et infirmiers s’identifiant comme 2SLGBTQIA+ à Winnipeg, au Manitoba.
En écoutant et en analysant les entretiens que j’ai menés avec les membres du personnel infirmier, j’ai été frappé non seulement par la discrimination flagrante, comme les insultes transphobes et homophobes, mais j’ai été davantage touché par les façons cachées et insidieuses dont la cishétéronormativité s’infiltre dans les interactions quotidiennes et par la façon dont j’ai vécu des expériences semblables.
Un exemple de la nature insidieuse de la cishétéronormativité est le besoin constant d’évaluer si la « sortie du placard » ou la divulgation de ma sexualité est sans danger sur le lieu de travail, et si je suis prêt à m’engager dans la vigilance nécessaire après la divulgation de mon orientation sexuelle pour réévaluer ma sécurité. Mes collègues hétérosexuels n’ont pas à s’inquiéter de mentionner le sexe de leur partenaire parce que c’est conforme à la norme sociétale de la cishétéronormativité.
Tout au long de mes travaux de recherche, j’ai eu du mal à revivre des expériences passées préjudiciables et à me sentir, en tant que chercheur, trop proche des participantes et participants à mon étude. Je pense à l’expression « rien sur nous sans nous » et je me rappelle que je suis peut-être la meilleure personne pour faire cette recherche. Et peut-être que le fait d’être queer, et de m’identifier au début de chaque entretien et dans ma documentation de recrutement, a permis aux infirmières et infirmiers qui s’identifient comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+ de se sentir plus à l’aise pour me transmettre leur expérience.
Alliance inclusive
Le terme « personne alliée » est souvent utilisé comme un nom, mais c’est aussi un verbe qui décrit une action. Je pense que beaucoup de membres du personnel infirmier aimeraient se considérer comme des alliés des personnes méritant l’équité, comme celles qui s’identifient comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+. Mais quels sont les gestes concrets que vous posez chaque année, chaque mois, chaque quart de travail, pour concrétiser votre alliance inclusive? C’est tout à fait normal de ne pas le savoir, mais j’encourage les membres du personnel infirmier à réfléchir à leur pratique et à leur vie. Les choses les plus simples peuvent avoir une grande importance pour la patientèle méritant l’équité.
Voici quelques exemples d’alliance inclusive :
- Se présenter avec ses pronoms et son nom avant de demander à sa patiente ou à son patient les siens;
- Demander la relation de la patiente ou du patient avec la personne qui l’accompagne, plutôt que de deviner;
- Porter une épinglette aux couleurs de l’arc-en-ciel, car vos collègues peuvent ne pas se sentir en sécurité en le faisant;
- Créer ou participer à un comité sur l’équité, la diversité, l’inclusion et l’accessibilité (EDIA);
- Préconiser des séances de formation dans votre établissement ou votre service sur les expériences de la patientèle qui s’identifie comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+;
- Plaider en faveur de formulaires d’admission et d’évaluation inclusifs.
Conclusion
Je me demande comment rendre la profession infirmière, les écoles de sciences infirmières et les soins de santé plus sûrs pour les personnes et les infirmières et infirmiers qui s’identifient comme faisant partie de la communauté 2SLGBTQIA+. Je ne pense pas qu’il y ait une réponse simple. Je pense qu’il faut d’abord que chaque infirmière et infirmier réfléchisse à sa pratique et procède à de petits changements. Il peut s’agir de rechercher des occasions d’apprendre quelles sont les mesures tangibles et continues dont vous avez besoin pour maintenir une alliance inclusive avec la patientèle et les collègues 2SLGBTQIA+. J’incite les infirmières et infirmiers à se plonger dans l’inconfort pour remettre en question le statu quo. L’apprentissage est souvent inconfortable parce qu’il remet en question les idées préconçues. La diversité est notre force et, en tant que membres du personnel infirmier, nous devons être déterminés à en faire notre priorité.
Adam Brandt (il/lui), inf. aut., B. Nurs., est étudiant à la maîtrise en sciences infirmières au collège des soins infirmiers, à la faculté des sciences infirmières Rady, de l’Université du Manitoba, et travaille à temps partiel dans un milieu de soins actifs et en tant qu’assistant à la recherche au niveau des études supérieures.
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